Weber Max [04] L’Etat détient le « monopole de la violence physique légitime »
Weber Max [04] L’Etat détient le « monopole de la violence physique légitime »
« S’il n’existait que des structures sociales d’où toute violence serait absente, le concept d’Etat aurait alors disparu et il ne subsisterait que ce qu’on appelle, au sens propre du terme, l’«anarchie [1]». La violence n’est évidemment pas l’unique moyen normal de l’Etat - cela ne fait aucun doute -, mais elle est son moyen spécifique. De nos jours la relation entre Etat et violence est tout particulièrement intime. Depuis toujours les groupements politiques les plus divers - à commencer par la parentèle[2] - ont tous tenu la violence physique pour le moyen normal du pouvoir. Par contre il faut concevoir l’Etat contemporain comme une communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé - la notion de territoire étant une de ses caractéristiques -, revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime. Ce qui est en effet le propre de notre époque, c’est qu’elle n’accorde à tous les autres groupements, ou aux individus, le droit de faire appel à la violence que dans la mesure où l’Etat le tolère. Celui-ci passe donc pour l’unique source du « droit » à la violence. Par conséquent, nous entendrons par politique l’ensemble des efforts que l’on fait en vue de participer au pouvoir ou d’influencer la répartition du pouvoir, soit entre les Etats, soit entre les divers groupes à l’intérieur d’un même Etat.
[...] Comme tous les groupements politiques qui l’ont précédé historiquement, l’Etat consiste en un rapport de domination de l’homme sur l’homme fondé sur le moyen de la violence légitime (c’est-à-dire sur la violence qui est considérée comme légitime). »
[Max Weber, Le Savant et le Politique, 1919, trad. Freund, « 10/18 », 1963, p. 124-126.]
[1] Sens propre : là où il n’y a pas de pouvoir.
[2] La famille au sens élargi.