Kant 141 vmc : La moralité ne dépend d’aucune confession religieuse [R. L. Raison]
Kant 141 : La moralité ne dépend d’aucune confession religieuse [R. L. Raison]
1724-1804 [1793]
[La religion au service de la moralité : Il est « possible » de considérer ses devoirs comme commandements divins bien que ce ne soit pas « prouvable ». Cette hypothèse fournit à la raison pratique et à la loi morale un « appui » transcendant.]
« La religion (considérée subjectivement) est la connaissance de tous nos devoirs comme commandements divins[1].
1 [Note de Kant : Grâce à cette définition, on évite mainte interprétation erronée du concept de religion en général.
Premièrement, elle n’exige pas en ce qui concerne la connaissance et la confession[2] théoriques, une science assertorique[3] (même pas celle de l’existence de Dieu) ; car, étant donnée notre déficience pour ce qui est de la connaissance d’objets suprasensibles, cette confession pourrait bien être une imposture; elle présuppose seulement, du point de vue spéculatif, au sujet de la cause suprême des choses, une admission problématiqueassertorique, libre, laquelle n’a besoin que de l’Idée de Dieu où doit inévitablement aboutir tout effort moral sérieux (et, par suite, plein de foi) en vue du bien, sans prétendre pouvoir en garantir par une connaissance théorique la réalité objective. Pour ce qui peut être imposé à chacun comme devoir, il faut que le minimum de connaissance (possibilité de l’existence de Dieu) suffise subjectivement. (une hypothèse), mais par rapport à l’objet en vue duquel notre raison, commandant moralement, nous invite à agir, une foi pratique, promettant un effet quant au but final de cette raison, par suite une foi
Deuxièmement, on prévient [4], grâce à cette définition d’une religion en général, la représentation erronée qu’elle constitue un ensemble de devoirs particuliers[5] , se rapportant à Dieu directement, et on évite ainsi d’admettre (ce à quoi les hommes sont d’ailleurs très disposés) outre les devoirs humains moraux et civiques (des hommes envers les hommes) des services de cours[6], en cherchant peut-être même par la suite à compenser par ces
derniers, la carence des premiers. Dans une religion universelle, il n’y a pas de devoirs spéciaux à l’égard de Dieu, car Dieu ne peut rien recevoir de nous; nous ne pouvons agir ni sur lui, ni pour lui. »
[Kant, La Religion dans les limites de la simple raison, 1793, Vrin, 1972, pp. 201-202.]